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Histoire

HISTOIRE de Beautiran

Un énorme travail de recherche historique a été réalisé dans la commune pour permettre de retracer les événements qui ont marqué la commune… 
Découvrez l’évolution de la commune depuis l’arrivée des Romains et l’histoire du port de Beautiran qui, aujourd’hui, n’existe plus.

A travers les siècles… Retour dans le passé pour évoquer l’origine du nom de la commune, les Romains qui ont apporté le vin, le XVIIe siècle et la manufacture des toiles indiennes ou encore l’entrée de la communauté de communes.

Beautiran, Boutiran ou Bautiran

Plusieurs théories plus ou moins plausibles ont été avancées concernant l’origine du nom de Beautiran mais on est obligé de reconnaître qu’on ne sait véritablement rien à ce sujet.

Dans les titres anciens, Beautiran s’est écrit avec un V ou un B, ce qui est normal chez les Gascons, les deux lettres se substituant très souvent. Il s’est également écrit Bautiran ou Boutiran.

Beautiran et l’eau

Si la Garonne couvrait à une époque l’équivalent de notre région viticole des Graves, elle s’est ensuite retirée et stabilisée dans le cours dit majeur qui correspond à la zone de crues actuelle, puis elle est devenue le fleuve que l’on connaît.
Les premiers hommes qui ont naturellement, à l’origine, habité les cavernes et abris sous roche de la rive droite, ont traversé le fleuve puis se sont fixés sur notre rive pour pêcher et cultiver nos riches terres d’alluvions.

Ils ont aussi asséché des territoires ou créé des rouilles et des ports, et ils ont développé progressivement une véritable civilisation du fleuve.

Les Romains arrivent ; ils nous apportent le vin, des végétaux méditerranéens dont de nouveaux pieds de vignes, et vont contribuer à développer l’expérience du vin de Bordeaux puisque c’est la région des Graves qui en sera à l’origine. Ils vont aussi mettre de l’ordre dans nos idées et changer notre façon de vivre.

Beautiran dans le Cernès puis dans le duché de Guienne

Les Barbares sont aussi venus, dévastateurs. Les hommes du Sud, les Sarrazins et les hommes du Nord qui, avec d’étranges bateaux vont remonter la Garonne jusqu’à Agen.

Et voilà les Anglais. Notre région leur plaît, ils y restent longtemps, ils y vendangent, ils commercialisent surtout notre vin, jusqu’à la bataille de Castillon qui mettra fin à la Guerre de Cent Ans.

En Terre Gasque

Les Girondins ont paraît-il, une réputation de frondeurs.
Au milieu du XVIIe siècle, c’est la Fronde de Bordeaux et notre région va perdre son calme traditionnel pour quelque temps. Les deux camps s’affrontent de Bordeaux à Cadillac sur la Garonne et ses rives, et les escarmouches seront surtout intenses d’Isle Saint Georges au Tourne.
Les châteaux d’Arbanats, de Langoiran, et certainement une partie de celui de Beautiran seront brûlés. Alexandre Dumas s’inspirera de cette période et écrira plus tard « La Guerre des Femmes ».

Le port et les toiles

Le XVIIIe siècle. Bordeaux et son port sont prospères. Un commerce discutable a été établi ; on le dit « triangulaire ». Beaucoup de matelots de Beautiran ont certainement dû abandonner leur gabare pour voguer vers les Antilles.
Beautiran a une Manufacture de toiles imprimées (c’est en fait la Manufacture de Bordeaux) qui imprimera des thèmes charmants comme « l’Art d’Aimer » mais elle imprimera aussi des indiennes dites « de traite » qui serviront de monnaie d’échange aux négriers.

Il était installé sur « L’Estey », appellation locale désignant la partie navigable du ruisseau Gat Mort, quotidiennement envahie par le flux des marées de la Garonne.
Au XVIII ème siècle, l’identité du village est presque entièrement liée à l’importance de son port.
En 1722, on écrivait à son sujet : « le port de Beautiran est l’un des plus beaux et des plus commodes qu’il y ait le long de la rivière Garonne, situé à quatre lieues de Bordeaux ».
Les Gabares à voiles, avec leur charge de plus de 20 tonneaux de vin, bois et autres denrées des particuliers des communes du canton, y circulaient en passant sous un pont haut en bois, « La Ponte ».
Celle-ci a été détruite par les inondations de 1930 et reconstruite en béton armé en 1931.
Le bois provenait de l’arrière pays landais, acheminé par les muletiers.

Dans les Graves de Bordeaux

Des idées nouvelles. C’est la Révolution. L’artisan et le paysan travaillent avec et pour le châtelain. Il habite ici parmi eux, il est leur conseil, leur morale et de plus, il connaissait leurs pères. Le calme règne et la commune ne connaîtra ni émeutes ni incendies.

Dans le canton de la Brède

Quel village de France ne peut se targuer de la visite de Napoléon ?
En 1808, l’Empereur revient d’Espagne et regagne Bordeaux. Il fait une halte au château de Portets et passe donc… à Beautiran.
1852 : Napoléon III fait un voyage historique sur la Garonne, embarqué sur l’Eclair. C’est un voyage impérial ; impérial aussi sera le classement des vins de 1855 qui fait toujours référence.
Malheureusement, depuis quelques années, une épidémie d’oïdium allait ravager notre vignoble. La qualité de notre vin en souffre ; par voie de conséquence le classement des Graves va en souffrir aussi.
Quelques temps plus tard, un autre fléau arrive, le phylloxéra. Le combat sera très rude.

Les guerres

La grande guerre – La mobilisation sera importante dans notre village, le nombre de morts également. Les grands-pères mais souvent aussi les femmes s’occuperont admirablement de leurs petites propriétés et feront avec courage « bouillir la marmite ».
La guerre s’éternise, on s’éloigne du Front et de Paris les maisons de repos de nos soldats ; près de chez nous, le château du Puch à Saint Selve deviendra hôpital militaire et des soldats anglais et américains fréquenteront alors notre gare.

La seconde Guerre – Les Allemands sont à Beautiran ou plutôt l’armée allemande car on y verra aussi des Autrichiens et des Russes…
Mais depuis 1942, nous avons aussi des Résistants. Les choses, ici, se passeront malgré tout calmement.

La Papeterie de Beautiran

Des entreprises aux activités diverses et les locaux des ateliers municipaux… Qui pourrait penser, sans connaître le passé de Beautiran, que durant soixante-quinze années, en ce même lieu, une papeterie a existé ; qu’elle a été un des plus gros employeurs du Sud-Gironde ?

L’histoire du site de la papeterie

Après les seigneurs de Lalande, ce sont les De Pontac, puissante famille du Bordelais qui ont possédé la baronnie de Beautiran de la fin du XVIe siècle (vers 1560) jusqu’en 1760. Ils ont acquis, ou fait construire, une gentilhommière sur les bords du « Gua-Mort » avec des dépendances et un moulin à blé sur l’Estey. L’ensemble, qu’on appelait alors « château de Beautiran », servait à la défense de l’entrée du port de Beautiran et de Castres, mais aussi, à percevoir des droits sur la pêche et le péage. Ce petit château figure sur la carte de Belleyme de 1785. Dans « Les Variétés Bordelaises » de 1785, l’abbé BAUREIN parle d’ « un château qu’on prétend avoir incendié et dont les restes subsistent au bord de l’estey de la marée… » Il est vraisemblable que, pendant les troubles de la Fronde et les durs conflits sur le fleuve qui firent rage en 1650 entre l’Isle Saint-Georges et Cadillac, ce château ait pu être sérieusement endommagé comme beaucoup d’autres des bords de Garonne.

Il y a tout lieu de penser que, après avoir appartenu aux De Pontac, ce soit la famille De Saige, nouvelle baronnie du village, qui serait ensuite devenue propriétaire du site. En effet, il apparaît que c’est Guillaume Joseph de Cazeaux, héritier de cette famille, qui vendit, en 1796 et 1797, le domaine de Lalande de Beautiran et le domaine de Sansaric à Castres, à Jean-Pierre Meillier et Cie qui créera la manufacture d’Indiennes de Beautiran ; mais également le moulin et le château de Beautiran à Jean Barreau, meunier. A cette époque, on parle de « moulin à eau et à deux meules et d’un domaine où on y produit du vin et des fruits ».

A la mort des époux Barreau, en 1828, le site est acheté, par adjudication et après de longues enchères publiques, par David Verdonnet, consul de Suisse à Bordeaux, associé et beau-frère de Jean-Pierre Meillier, l’indienneur. Il deviendra par la suite, avec son fils, après 1821, propriétaire de la Manufacture des toiles de Beautiran. Dans l’acte de 1828, l’ensemble du site du château de Beautiran est décrit comme « une maison de maître dont une partie a été récemment bâtie, un moulin à blé avec deux meules, situé au midi de la maison de maître et à peu de distance de l’Estey de Beautiran. Au devant de ce moulin est un escalier en pierre avec une main courante en fer. Une partie du moulin est pavée de pierres de Barsac, avec une porte donnant sur l’Estey, par où viennent charger et décharger les bateaux ». Le château, quant à lui, est décrit comme « un vieux bâtiment à un étage dont les pièces sont inhabitables… couvert de tuiles plates en bon état ». Le domaine comprend également divers bâtiments agricoles, une pièce de vigne, une prairie et une aubarède (culture de l’osier dont les rameaux, qu’on appelle ici « vime », servent à lier la vigne).

Après sa vocation de moulin à blé, le site, très endommagé, est passé par plusieurs mains et a changé sa destinée première. A partir de 1840, plusieurs facteurs lui sont favorables :
– le site comprend beaucoup de dépendances abandonnées
– il se trouve à proximité du port de Bordeaux
– le port de Beautiran est un des plus importants en amont de Bordeaux
– le Gua-Mort est alors praticable par les gabares jusqu’au port de Castres Toutes ces raisons font qu’un ancien droguiste de Bordeaux, M. DESPAX, va établir en ce lieu une fabrique de crème de tartre. Puis, il construit une maison bourgeoise et une usine pour le décorticage du riz et l’effilage des bois de teinture. La Statistique de France indique qu’en 1852, l’effilage de Beautiran a produit pour 100 000 Francs d’affaires. Cette production industrielle a dû certainement être assez importante car dans « La Gironde » de A. JOANNE, de 1877, dans la rubrique « Industries », sont signalées les usines à bois de teinture de Beautiran.

En 1869, E. GUILLON décrit, après sa visite en 1868, dans « Les châteaux historiques et vinicoles de la Gironde » : « Le château sert de magasin à cette industrie, il est dans un état déplorable de conservation, ses chambres sont pleines de sacs de riz et de crème de tartre, sa cour est encombrée de monceaux de bois de campêche. C’est une grandeur déchue, c’est un grand seigneur devenu manufacturier !… » On sait, en effet, toujours d’après la description de GUILLON à cette époque, qu’il reste « un corps de logis rectangulaire à toit conique, avec des gargouilles, des fenêtres avançantes, des cheminées vastes et sculptées dans le goût de l’époque. Le corps de logis est encore entouré de murailles dans lesquelles s’ouvrent des embrasures basses, pour armes à feu ».

En 1913, A. REBSOMEN, dans « La Garonne et ses Affluents de la Rive Gauche de La Réole à Bordeaux », ne parle plus des murailles mais remarque aussi « le toit à angle aigu soutenu par un pignon aux rampants ornés de crochets et des fenêtres à meneaux et à traverses décorées de moulures ». Il ajoutera que « cette habitation englobée dans une importante usine de superphosphates que dirigent Mrs ULRICH et CORNETTE, court de grands risques de disparaître, sacrifiée aux exigences de l’industrie moderne ». En effet, en 1910, Georges ULRICH et Henri CORNETTE, sous la raison sociale ULRICH & CORNETTE, avaient ouvert une usine de produits chimiques pour la fabrication de l’acide sulfurique et de leurs dérivés, de superphosphates et d’engrais composés. Cette production ne dura que peu de temps. Le site fut, en partie, désaffecté mais les diverses industries qui l’ont occupé depuis le milieu du XIXe siècle, l’ont progressivement démoli et transformé.

En 1924, la SA « Le Kraft Français » rachète l’ensemble, va le transformer à nouveau et l’équiper pour créer une papeterie.

C’est alors une nouvelle aventure.

Après sa visite, vers 1950, le professeur Paul ROUDIE, dans « L’activité artistique à Bordeaux, en Bordelais et en Bazadais », décrit avoir vu, entreposés dans l’actuelle papeterie, « des fragments importants de la décoration du pignon : fleuron, morceaux du faux-chevron hérissé de crochets et extrémités des faux-chevrons avec des animaux monstrueux mutilés ». Il juge alors ces restes antérieurs à 1572.

A cette époque encore, il restait un bâtiment qu’on appelait « la chapelle », vraisemblablement l’ancienne chapelle du manoir ; et ce bâtiment, ainsi que les dernières pierres qui subsistaient, auraient été détruits en 1952.

Quelques pierres ouvragées auraient été entreposées dans le parc du château de Martignac, qui, à l’époque, était la demeure de fonction du directeur des papeteries. A ce jour, il ne subsiste plus que les fondations du moulin du Gat-Mort, très envasées. Il est toujours intéressant de remarquer que ce lieu porte encore sur le plan cadastral, la mention « le château ».

L’histoire de la papeterie et de la sacherie de Beautiran

D’après une carte postale, qu’il est possible de dater d’environ 1912, il semblerait que le site ait déjà servi pour une « usine à papier » à cette époque.

Mais, en 1924, le site du château de Beautiran est de nouveau désaffecté et les bâtiments sont rachetés par la société Le Kraft Français pour créer, en 1925, une usine à Beautiran, qui fabriquera de la pâte à papier à base de vieux papiers. En 1925, également, la société Ch. LORILLEUX et Cie de Paris avait créé, dans un bâtiment situé le long du Gat-Mort, au lieu-dit Les Ponts, une fabrique d’encre d’imprimerie. Cette exploitation ne durera que quelque temps et le bâtiment sera racheté et servira de dépôt par la suite pour la papeterie et la sacherie.

En 1932, l’usine de Beautiran ferme. Par délibération du 5 juin 1932, on apprend que la commune vote la création d’un fonds de chômage.

En 1936, la société MORQUIN-MUGUET de Paris, spécialisée dans la transformation du papier, reprend l’ensemble pour créer la papeterie de Beautiran.

En effet, la situation du site est particulièrement intéressante grâce à la proximité du port de Bordeaux, de la gare de Beautiran (d’ailleurs un embranchement de particulier sera créé pour la papeterie) et de la connexion avec la ligne des Chemins de Fer Economiques qui servira à l’importation du lignite d’Hostens, pour chauffer le four, et de la pâte à papier en provenance des Landes. C’est en 1938 que l’on verra la création d’une usine de transformation, la sacherie. C’est également à la même époque que la papeterie de Beautiran va créer un stade privé dans son site même, réservé au personnel de l’usine et à leur famille ; installation assez remarquable pour l’époque.

Pendant la période de la guerre, il semblerait que la papeterie ait tenté de fabriquer sur place de la pâte à papier avec du bois, mais cette expérience ne se poursuivra pas car elle s’avèrera vite infructueuse. On apprend également que, pendant la dernière guerre, compte tenu de l’intérêt économique et stratégique que représentaient la papeterie et la gare de Beautiran, une garnison allemande s’est établie dans le village. A la sortie de la guerre, il serait resté une dizaine de prisonniers allemands qui auraient été, alors, employés à la papeterie.

Toujours dans cette période difficile, vers 1943, la papeterie construira le barrage sur le Gat-Mort, situé près de la propriété du Couloumey qui servira à entretenir l’Estey et à réguler ses eaux, notamment pour la fabrication du papier blanc.

La papeterie de Beautiran possédait deux machines principales. Une de ces deux machines, la numéro 2, semble-t-il, aurait été arrêtée pendant la guerre mais elle a été relancée en 1950. A cette époque, les deux unités de Beautiran, la papeterie et la sacherie, sont en plein essor et à elles deux, vont employer entre 300 et 320 personnes. Il convient aussi de noter que M. SCHNERB, directeur de la papeterie de Beautiran, depuis l’ouverture en 1937 et jusqu’à la guerre, a supervisé depuis 1948 et pendant quelques années, une petite usine de transformation de papier qui faisait partie du groupe « CENPA ». Elle était située au quartier du port de Portets et employait environ une quarantaine de personnes.

Si, depuis la reprise, on a construit pas mal d’extensions, on constate, au début des années 50, que l’ancien moulin comportait encore une grande partie de son mécanisme avec sa roue. Malheureusement, à cause d’une concurrence assez vive de l’Europe du Nord et du Canada, et de ses équipements assez vétustes, la Société Nouvelle des Papeteries de Beautiran, qui faisait alors partie du groupe Papeteries de Gascogne fermera ses portes en 1978.

Par ailleurs, la sacherie, à l’époque SONOSAC (Société Nouvelle de Sac) avait passé des accords commerciaux avec la société CENPA et deviendra SONALSAC SA. Elle aura une usine « jumelle » pendant quelque temps en Alsace, à Schweighouse sur Moder.

Cette usine deviendra, le 1er janvier 1984, ROCHETTE-IMAGE-INDUSTRIES jusqu’à sa fermeture fin 1985.

Cette sacherie sera finalement reprise le 1er avril 1986 par MINGAUD de Saint-Junien et va reprendre le nom de SONALSAC. A cette époque, elle occupera encore jusque 35 à 40 personnes, mais malheureusement, elle devra de nouveau fermer et, cette fois-ci, définitivement le 15 septembre 1999.

La papeterie et la sacherie de Beautiran ont pu être considérées pendant de longues années, comme un des employeurs les plus importants du Sud-Gironde. En effet, si elles ont fait travailler un très grand nombre de Beautiranaises et de Beautiranais, elles ont également contribué à employer beaucoup d’habitants de plusieurs villages environnants de Saint-Médard d’Eyrans à Portets.

Il faut aussi noter, par ailleurs, que ces deux usines ont participé à l’animation de Beautiran et de Castres. On peut citer, entre autres, des journées-repas offertes par la direction, des sorties organisées par le comité d’entreprise, des moments forts pour des remises de médailles du travail, des Noëls de l’après-guerre dans la papeterie même, avec des spectacles de grande qualité qui se tenaient dans la salle des bobines, transformée en salle de spectacle pour l’occasion. Il est encore dans les mémoires qu’elles ont également sponsorisé l’ASPB, club de football de Beautiran, en faisant une équipe de très haut niveau régional dont l’apogée a été la finale de la coupe du Sud-Ouest au stade municipal de Bordeaux en 1948.